Acrobatie d’une truite

[ScambusParticipant 194]

Quand j’accompagne une beauté au bal des dentelles écumeuses c’est merveilleux, pas facile d’avoir la main pour exprimer toute la légèreté d’une plume sur une compagne, mais je vous assure c’est très particulier et merveilleux d’y prendre son pied.

ACROBATIE D’UNE TRUITE

Le torrent paré de flambeaux lumineux où grondent des voix mélodieusement graves, exprime des forces finement intelligentes et des puissances ondulantes hallucinantes. Portés par le mouvement des cimes, des souffles se libèrent du corps de brise semant des grains de poches fraîches sur les tablettes translucides entremêlées des cascades. Les rocs exigeants épurent leurs fêlures pour tisser des caractères sonores dans les profondeurs des rêves et des pensées.

Les spectacles de la lumière épousent la matière enroulant le sommeil des abîmes, la beauté du paysage papote avec les instruments clavicordes touchant des tables d’harmonie, les secrets mélodieux s’élèvent des berceaux de coton s’accordant à la hauteur du diapason et les yeux roulent dans les tourbillons déchainés appelant l’unisson.

Dans ce rassemblement merveilleux d’éléments, la pêche à la mouche en eau rapide exprime des impulsions émergentes, la passion devient magie à en faire danser le hasard, les forces se forment et se déforment dans cet enchainement de secrets soniques, l’attente d’une création devient vertigineusement magnifiée par le fluide bouillonnant. Les instants s’allongent sur chaque reflet lançant un appel à l’infini, le mystère des sonorités éclabousse les cordes de l’eau et la méditation habille le plaisir tout en éveillant le corps qui vibre comme une corde de guitare.

La soie de vie échauffe son âme tout en bavardant avec les chutes d’eau, la pointe tremble comme une plume sur les fragments ininterrompus des points de l’espace, quelques branches se penchent embrassant délicatement la gestuelle tout en laissant rire quelques épineuses embrassant la falaise. La mouche hérisse ses poils pour ne pas s’endormir sur les oreillers d’écumes argentées, les relances dansent laissant valser les énergies. La main de moucheur développe un ballet sur des options rythmiques et des intensités variées, l’art est mis en relation avec les sinuosités argentiques du liquide attendant une expression sans dire mot.

Les enchevêtrements des flots bordent de soyeuses mèches enroulant d’élégantes barbes caresseuses, les éclaboussures maquillent d’innombrables pupilles félines nourrissant des miroirs tremblants sur les veines de cristal. La beauté d’une fée n’est pas assurée dans ce bouquet d’animations mais l’harmonie des salmonidés à l’apesanteur offre parfois des bijoux suspendus extrêmement sublimés.

Les cibles du fouet nourrissent le temps, les posés lumineux sur cette eau en vadrouille coiffent chaque barbichette avec délicatesse et précision, les pointes embellissent la mouche, les inclinés enroulent les balancements, aux tirés de rideau les noyades de la danseuse sont évitées par la droiture du dernier coup. Les espaces de ce boléro rassemblent les éléments d’une gestuelle harmonique, la création d’un univers d’images peut s’ouvrir avec grâce à tout instant, la patience glisse sur l’action accompagnant la concentration.

Une passe croisée ouvre le cœur du spectacle, l’accompagnement revers anime la scène, la Berzilleuse flirte sur une vague écumeuse à en faire vibrer l’attention, le jaillissement éclair d’un saut de truite majestueux dans les airs légèrement embrumés explose le cadre, une voltige acrobatique s’exécute avec vigueur sur les gerbes de dentelle. Pendant une fraction de seconde le corps suspendu en l’air d’une fario dévoile sa beauté en croissant de lune, le pas de truite s’exécute merveilleusement dans une étonnante célérité, le fuselage pailleté fusionne l’atmosphère pour disparaitre dans d’écumeuses bulles.

La focalisation devient turbulente, l’excitation du mouvement incontrôlable, la main tremblante sur ce coup de foudre émoustille le scion, les yeux en queue de paon boivent ce coup magique et l’imitation garde en secret son béguin dressant ses ailes d’uropygien avec le plus intime du jeu de séduction tout en noyant sa présence au plus profond du torrent.

Dans cette communion des gestes, les sons cristallisent l’eau tumultueuse, l’air parsème ses bouquets de parfum et le pêcheur est leurré. Émerveillé de ce vaste univers qu’est la nature, un immense silence s’harmonise tout en mettant en fête les sens, une dose de bonheur embellit la porte de l’eau et les frissons délicieux de la vue s’offrent les verts remous en espérant revoir des sillons de flèche d’or.

Christian   le 14/03/2024

[DominiqueParticipant 56]

Superbe image d’une passion décrite avec beaucoup de ferveur ! 👍

Merci Iouri ce beau partage Christian

[CoujouModérateur 2,923]

Quel poète notre Scambus, merci pour cette narration

[Auteur]

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