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Pêcheur de truites – Dr Jean JUGE

Fiche descriptive

 

AUTEUR : Docteur Jean JUGE

LANGUE : Française

EDITEUR : Par l'auteur

DATE DE SORTIE : 1959 (ré-impression 2012)

FORMAT : 23 x 17 cm

NOMBRE DE PAGES : 269

PRIX INDICATIF : Ce livre est devenu assez rare. Mais en cherchant un peu, la 2ème édition peut se trouver d'occasion pour une cinquantaine d'euros.

 

1ère de couverture

 

L'auteur, le Dr Jean JUGE

 

Il est né en 1901 à Pompadour (Corrèze) et mort en 1965. Il fut l'un des plus grand pêcheur à la mouche de sa génération.

 

 

Installé à Chamberet (haute-Corrèze) en 1930, il exerça son métier de médecin avec la même ferveur que ses deux autres passions, la pêche à la mouche et la chasse.

À cette époque, cette profession en zone rurale nécessitait détermination, dévouement et disponibilité. Tout ceci caractérisait le Docteur Juge. Il parcourait sans relâche les chemins de campagne pour le seul bien de ses patients.

Bien qu'étant un grand professionnel, cela ne l'empêchait pas d'être un fameux "ripailleur" et un personnage haut en couleur. Il était très apprécié par sa grande sociabilité et sa convivialité de tous les instants.

Ses rivières de cœur furent la Vézère, la Vienne et l'Auvézère. Il y prenait toujours 2 ou 3 fois plus de truites que les amis avec lesquels il partageait sa passion. Mouche noyée, puis pêche en sèche furent ses techniques de prédilection.

Outre un pêcheur d'exception, il fut aussi un entomologiste et monteur d'avant-garde. Il travailla ainsi dans les années 50 sur ce qu'il nomma ironiquement "mouches exactes". Le caractère "diaphane" de ses créations étaient révolutionnaire pour l'époque. Le docteur Juge baptisa ces petites éphémères ailées "diaphanoptères".

Et bien sur, si l'on ne devait retenir qu'une seule de ses créations, ça serait "l'exquise". Cette mouche traversa les époques sans prendre une ride (voir & ci-dessous).

 

Résumé de l'ouvrage et critique

 

Bien que son titre n'en fait pas état, ce livre est exclusivement consacré à la pêche à la mouche. On peut distinguer 5 grandes parties :

  • Histoire de ma vocation
  • Faits divers
  • Loin du terroir
  • Portraits
  • Techniques de fabrication des mouches artificielles

Tout le charme de cet ouvrage réside par son caractère un peu "fouillis" et débridé. À l'exception des écrits techniques, il ne possède pas de véritable trame, ni de lien d'un chapitre à l'autre, qui sont très courts (3 à 4 pages).

La plupart des récits autobiographiques sont plaisants et les portraits que l'auteur nous livre sur certains de ces amis hauts en couleur sont savoureux.

Quant aux chapitres consacrés aux techniques de pêche et de montage, on y décèle rapidement les compétences et la clairvoyance de l'auteur. Elles sont quasiment uniques pour l'époque, où la pêche à la mouche en était à ses balbutiements.

Le livre est joliment illustré de dessins à l'encre noire du Docteur Roger Perraud.

 

 

Et les fiches de montage (pas à pas) sont également imagées de croquis "faits mains".

 

 


AVIS : j'ai beaucoup aimé !

De prime abord, ce livre peut paraitre anodin. Mais au fil de sa lecture, il s'avère être passionnant par un savant mélange de récits de pêche bien ficelés, d'anecdotes truculentes, et de considérations techniques très pertinentes et parfaitement exposées. Et le tout est écrit avec un style riche et plaisant !

Je lui attribue la note de 16/20

 

Extraits

 

Ma première canne ...

" Maîtrisant l’émotion, impassible, je l'ai montée subrepticement au dortoir. L'emballage fut disloqué fébrilement et je sombrai dans un ravissement mystique. Enveloppés dans un fourreau de toile grise, douillettement étirés, les brins de la canne délicatement vernis reposaient dans un étui de bois blanc tapissé de cotonnade rouge. Je les caressai avec idolâtrie et les mis en sommeil en attendant de les nimber de gloire, sur les entretoises de mon châlit de fer, à l'abri des fureteurs. La pièce maîtresse de cette fidèle servante vit encore son veuvage dans un placard, entourée d'une cour respectueuse d'honorables consœurs ; son vaillant partenaire, aux lignes filiformes, maintes fois appareillées, a succombé d'une fracture comminutive dans l'emportement d'un combat. "

 


Mes mouches araignées ...

" Les mouches artificielles araignées de ma création n'avaient aucune ressemblance avec l'ogresse horrifiante dont elles empruntaient le patronyme. À l'inverse des araignées vivantes, elle n'engendraient aucune répulsion. J’en bâtis un nombre incalculable, diversifié à l'infini par la taille et par la couleur. Bientôt, leur conformation me paru beaucoup trop imposante, trop grossière. Et j'éprouvai le besoin de les transformer, de les monter plus grêles, plus déliées, plus vaporeuses, tout en conservant leur rusticité et leur dispositions hydrophobes. Ces mouches araignées ont des qualités dont beaucoup de bons pêcheurs se contentent. Elles flottent parfaitement, se dessinent remarquablement dans l'agitation des remous et sont à conseiller à tous les débutants, à cause de leur robustesse et aussi … de leur attirance. "

 


La vision des truites...

" Des convictions, largement partagées, m'ont amené à considérer les truites, à l'instar des rapaces aériens, comme guidées sélectivement dans leurs fonctions de relation par la vue. J'ai donc normalement mis en chantier une série de mouches artificielles, dans le but de donner le change aux truites, en leur présentant des imitations aussi exactes que possible des insectes qu'elles préfèrent. Mais leurs réflexes préhenseurs peuvent aussi être déclenchés par des excitants qui frappent ailleurs qu'aux yeux. Comment expliquer, en effet, que les truites se nourrissent dans des eaux boueuses de proies dont les contrastes doivent avoir bien du mal à impressionner leur rétine ? Il faut accepter qu'elles sont dotées de sens mystérieux, grâce auxquels elles détectent toutes les présences étrangères, et particulièrement les cadavres et les êtres vivants dont elle se saisissent. "

 

La mouche exquise (ou double collerette)

 

En 1918, alors qu'il n'avait que 17 ans, le docteur juge créa la fameuse mouche à double collerette, qu'il baptisa poétiquement "mouche exquise".

 

Le Docteur Perraud en fit une délicate représentation.

 

La particularité de cette mouche typiquement corrézienne est ... qu'elle ne ressemble à aucun insecte aquatique ou terrestre. Mais plus d'un siècle après sa création, qui n'en possède pas quelques-unes dans sa boite à mouche ?

À titre personnel, je suis un grand fan de cette imitation qui se montre particulièrement efficace en petite taille pour les poissons difficiles sur les lisses, ou en plus grosses tailles sur les eaux rapides.

Comme dit plus haut, le docteur Juge pêcha presque exclusivement avec ce même modèle pendant toute sa vie. Mais il faisait varier les teintes du corps et des collerettes à l'infini en fonction des conditions.

Concernant la description que nous fait le créateur de cette artificielle, elle est pour le moins originale : "2 roues jointes par un essieu".

Voici les schémas de montage originaux de cette mouche :

 

 

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